Santosh , Allemagne, Inde, Royaume-Uni 2024 – 128min. 3363t
Critique du film s3n37
La chute abrupte d’un idéal 4x5i6g
Dans une région rurale du nord de l’Inde, la jeune Santosh a hérité du poste de son défunt mari. Dénonçant des inégalités sociales qui aujourd’hui encore sont la norme, le film se suit comme un thriller haletant, sans jamais prendre le chemin de la facilité.
En vertu d’une loi locale en vigueur, Santosh (Shahana Goswami), 27 ans, hérite du poste de gardien de la paix de son défunt mari, tué dans une émeute alors qu’il était en service. Idéaliste sans être naïve, elle fait de son mieux pour se montrer à la hauteur du souvenir de son époux, «homme d’une rare intégrité» d’après un collègue. Prise sous l’aile de sa supérieur Sharma, pionnière féministe aux entournures qui ne s’en laisse pas conter dans un monde d’hommes dominé par le système des castes, son monde bascule le jour où elle est chargée d’enquêter sur la mort d’une jeune Dalit, «intouchable» d’une caste traitée en paria dont le corps est retrouvé dans un puits.
Nul besoin de connaître la culture indienne ou les films de Bollywood pour apprécier «Sandhya Suri, Britannique d’origine indienne, s’est tournée vers la fiction pour raconter les violences faites aux femmes. Suivant sa propre boussole morale, convaincue qu’un travail bien fait peut contribuer à rendre la justice un peu plus égalitaire entre intouchables et privilégiés, le parcours de Santosh l’amène petit à petit de déconvenue en déconvenue, jusqu’à une dernière désillusion brutale.
30 ans plus tôt, Sharma a dû se battre pour être acceptée comme policière dans un milieu d’hommes, comme elle l’explique à sa jeune collègue encore pleine d’idéaux. Si sa cheffe parle beaucoup, Santosh, en revanche, est une femme de peu de mots. C’est par le regard qu’elle communique, quand un haussement de sourcils ou l’ombre d’un sourire sont plus parlants que de longues explications. Porté par d’excellentes actrices, le film doit également beaucoup aux non-professionnels qui campent les seconds rôles. Violence, corruption et misogynie sont la réalité quotidienne à laquelle les femmes, mais aussi les hommes des castes inférieures, ou appartenant à une minorité religieuse, doivent faire face.
À peu près au même moment où sortent les séries Netflix « Santosh » arrive sur les écrans. En 2012, le viol collectif dans un bus puis le meurtre sauvage d’une jeune femme à New Delhi avait fait le tour de la planète. Parmi les policiers chargés du maintien de l’ordre dans les manifestations qui avaient suivi, un seul visage de femme: c’est de cette image qu’est partie Sandhya Suri pour raconter son histoire, par les yeux de Santosh. Six ans plus tôt, Weinstein et #metoo avaient déclenché un mouvement planétaire de combat pour le droit à l’égalité. Est-ce suffisant? Manifestement, non. La route est encore longue.
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CommentairesPlus 5o2z6s
“Indian police”
Le mari policier de Santosh est mort. Pour pouvoir espérer conserver leur appartement fourni par l’Etat, la veuve a la possibilité de reprendre le poste du défunt. C’est ce qu’on appelle dans le pays de Gandhi, un « recrutement comionnel ».
Celle que sa belle-mère n’hésitait pas à humilier, se plaignant de son absence de manières et de ses goûts dispendieux, porte aujourd’hui l’uniforme. Devenue très naturellement une gardienne de la paix sans arme, Santosh va être amenée à enquêter sur le meurtre d’une fille dalit retrouvée, se confrontant au age à tout ce qui plombe la société indienne.
Avec audace, le premier long-métrage de la réalisatrice n’hésite pas à aborder les sujets sociopolitiques qui fâcheraient comme la corruption généralisée, la misogynie crasse, les problèmes entre castes et les discriminations ethniques. Elle tente même un rapprochement lesbien peu habituel à Bollywood. Au plus près de son personnage novice, sa caméra la suit dans ses découvertes, lui réservant une descente tendue dans un hôtel miteux et une séance de torture éprouvante. Sa mise en scène se montre aussi créative en transformant furtivement un couple d’amoureux sur le quai d’une gare, en un folioscope animé par le age d’un train.
Son intrigue tenue rappelle La nuit du 12 de Dominik Moll. Si le décorum diffère, la violence faite aux femmes et l’impression d’impuissance au final se rejoignent. L’âme de Santosh a beau être charitable, elle n’en sera pas moins abîmée par un système vicié qui, pour la bonne cause, s’autorise à faire d’un innocent un martyr.
(7/10)… Voir plus
Dernière modification il y a 20 jours
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